Le témoignage de l'Ecriture

La bulle Ineffabilis Deus cite deux textes de l'Ecriture: Gen., III, 15 et Luc, I 28, 42.

Dans le Genèse, ce privilège est implicetement ou confusément révélé comme en germe dans ces paroles de Dieu adressées au serpent, figure du démon (Gen., III, 15): "Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité; celle-ci t'écrasera la tête et tu la mordras au talon". Celle-ci, c'est-à-dire la postérité de la femme, car dans le texte hébreu, le pronom est masculin et désigne les descendants de la femme; de même dans les Septantes et la version syriaqye. La Vulgate a mis ipsa qui se rapporte à la femme elle-même. Le sens d'ailleurs n'est pas essentiellement différent, car la femme sera associée à la victoire de celui qui représentera éminemment sa postérité en lutte avec le démon au cours des âges.

Par elles-mêmes ces paroles ne suffisent certainement pas à prouver que le privilège de l'Immaculée Conception est révélé, mais les Pères, dans leur comparaison d'Eve et Marie, y ont vu une allusion à cette grâce, c'est à ce titre que Pie IX cite cette promesse.

La tradition chrétienne a vu dans cette promesse, qui a été appelée le protévangile, le premier trait qui sert à désigner le Messie et sa victoire sur l'esprit du mal. Jésus représente, en effet, éminemment la postérité de la femme, en lutte avec la postérité du serpent.

La bulle Ineffabilis Deus cite aussi dans la salutation de l'ange à Marie (Luc I, 28): "Je vous salue, pleine de grâce, vous êtes bénie entre les femmes", et les mêmes paroles dites par sainte Elisabeth sous la révélation divine (Luc, I, 42). Pie IX ne dit point que ces paroles suffisent par elles-mêmes à prouver que le privilège de l'Immaculée Conception est révélé; pour qu'elles aient cette efficacité, il faut y joindre la tradition exégétique des Pères.





Cette tradition devient explicite avec saint Ephrem le Syrien (+373) (Dict. Théol., art. Ephrem, col. 192) et chez les Pères grecs au lendemain du Concile d'Ephèse (431), en particulier chez deux évêques adversaires de Nestorius: saint Proclus, un des successeurs de saint Jean Chrysostome sur le siège de Constantinople (434-446) et Théodote, évêque d'Ancyre (430-439), puis chez saint Sophrone, patriarche de Jérusalem (634-638), André de Crète (+ 740), saint Jean Damascène, mort vers le milieu du VIIIe siècle, dont les témoignages sont assez longuement rapportés par le P. X.-M. Le Bachelet, Dict. Apol., art., Marie, col. 223-231.

A la lumière de cette tradition exégétique les paroles de l'ange à Marie: "Je vous salue, pleine de grâce", ... la Sainte Vierge n'aurait pas reçu cette plénitude de grâce si son âme avait été un instant dans l'état de mort spirituelle par suite du péché originel, si elle avait été un instant privée de la grâce, détournée de Dieu, fille de colère, dans un état de servitude sous l'empire du démon. Saint Proclus dit qu'elle a été "formée d'un limon pur" (Orat. VI). Théodote d'Ancyre dit que le "Fils du Très-Haut est issu de la Trsè-Haute" (Hom VI, in sanctam Mariam Dei genitricem, 11-12).



Saint Jean Damascène écrit que Marie est la fille très sainte de Joachim et d'Anne qui "a échappé aux traits enflammé du malin" (Hom. I in Nat., 7), qu'elle est un paradis nouveau "où le serpent n'a pas d'entrée furtive" (Hom. II in dormit., 2 col 725) qu'elle est exempte de la dette de la mort, qui est une des suites du péché originel (Hom. II in dormit., 3, col 728), elle doit donc être exempte de la déchéance commune.

Si Marie avait contracté le péché originel, la plénitude de la grâce aurait été restreinte en ce sens qu'elle ne se serait pas étendue à toute sa vie. L'Eglise, en lisant les paroles de la salutation angélique à la lumière de la tradition et avec l'assistance du Saint-Esprit, y a vu le privilège de l'Immaculée Conception, implicetement révélé, non pas comme l'effet dans la cause qui peut exister sans lui, mais comme une partie dans le tout; la partie est actuellement dans le tout au moins implicitement énoncée.






Solennité de l'Immaculée Conception de la Vierge Marie - Christ Roi