ÉPÎTRE DE SAINT JUDE

Comment s’explique la ressemblance de l’Épître de S. Jude avec la seconde de S. Pierre ?

Les coïncidences de l'Épître de S. Jude avec la seconde de S. Pierre ne peuvent s'expliquer que par une imitation volontaire de la part de l'un ou de l'autre Apôtre. Un certain nombre de commentateurs attribuent cette imitation à S. Pierre, en alléguant pour raison que, dans sa première Lettre, il a reproduit pareillement plusieurs pensées de S. Paul. Néanmoins, la supposition contraire parait plus vraisemblable.

En effet :

— 1° Il n'y a pas de parité entre les allusions que S. Pierre a pu faire dans sa première Épître à certains passages de saint Paul et un emprunt si littéral et si étendu, qui comprendrait la plus grande partie de l'Epître de S. Jude.

— 2° S. Pierre n'avait pas d'intérêt à s'approprier la Lettre de S. Jude. S. Jude, au contraire, trouvait un avantage à citer S. Pierre : il ajoutait à sa considération et à son autorité personnelles celle du Prince des Apôtres et du chef de l'Eglise.

— 3° L'Épître de S. Pierre paraît avoir été écrite la première. Elle parle au futur; elle prédit les hérésies qui vont bientôt paraître, II, 1-3 : celle de S. Jude parle au passé, elle donne les faits qu'elle décrit pour l'accomplissement des prophéties faites par les Apôtres. Par suite, S. Jude combat les sectaires avec plus de force et les caractérise d'une manière plus précise.

— 4° Le style de S. Jude est meilleur, plus soigné, plus soutenu. On y voit moins de répétitions.

— 5° S. Jude paraît commenter et expliquer S. Pierre. Au verset 10, il développe et éclaircit ce que S. Pierre avait laissé dans l'ombre, et au verset 9, sa citation du livre de l'Assomption de Moïse semble avoir pour but de confirmer un fait qu'a avancé S. Pierre. L' Épître de S. Jude nous semblerait donc postérieure et d'une date assez rapprochée de la ruine de Jérusalem.

Quoi qu'il en soit, du reste, la ressemblance si visible qui existe entre ces deux Épîtres est une preuve de leur authenticité. On ne se fait pas faussaire pour le plaisir de transcrire, et l'on n'a pas d'intérêt à s'approprier ce qui est sans autorité. (L. BACUEZ.)