CHAPITRE II.
DES VERTUS de la Sainte Famille.
D. Comment se comportait la Sainte Famille dans cette conduite si rigoureuse que le Père Éternel tenait sur elle ?
R. Les trois Saintes personne qui la composaient y ont fait paraitre toutes les vertus en un souverain degré ; mais spécialement la conformité à la volonté de Dieu, qui était la source de leur patience admirable.
D. En quoi consistait leur conformité à la volonté de Dieu ?
R. Cette vertu était la première, ou plutôt le principe et l'âme de toutes les autres auxquelles elle donnait le mouvement : Elle consistait en ce qu'ils n'avaient point d'autre vouloir, ou non vouloir que celui de Dieu, auquel ils se conformaient toujours et en tous les accidents les plus fâcheux, entièrement, librement, joyeusement, en sorte que la divine volonté y régnait d'une manière absolue.
D. Quelles sont les autres vertus qui ont éclaté dans la Sainte Famille ?
R. J'y remarque la charité parfaite dans les trois personnes, la foi et l'espérance en un sublime degré dans la Sainte Vierge et Saint Joseph, et la vertu de Religion ; et l'humilité, l'obéissance, la pauvreté d'esprit et la chasteté qui paraissaient pardessus toutes les autres.
D. Je vous prie de m'entretenir de chacune en particulier ; j'espère que cela ne me sera pas peu utile dans le désir que j'ai de les imiter selon l'étendue de ma petite grâce ?
R. Je le ferai d'autant plus volontiers que vous me faites cette demande par le motif qui m'a obligé d'entreprendre ce petit Ouvrage. Leur Foi était si grande, que Sainte Élizabeth, la reconnut comme le principe du bonheur de la Sainte Famille, quand elle dit à la Sainte Vierge qu'elle était bienheureuse parce qu'elle avait crû. En effet ce fut la foi qu'elle eût aux paroles de l'Ange, qui tira de son cœur et de là bouche ce grand Flat, source de bonheur, non seulement de la Sainte Famille, mais de toute la nature humaine. C'était par la foi que Saint Joseph acquiesçait si promptement a tout ce que Dieu lui révélait par ses Anges ; ce fut par la foi qu'il connut le mystère de la fécondité de la Sainte Vierge, et qu'il la prit pour son Épouse. C'était leur foi qui leur faisait connaitre les grandeurs de Jésus dans ses bassesses, sa toute-puissance dans sa faiblesse, sa sagesse dans l'enfance, sa divinité cachée dans son humanité, qui était le sujet de leurs considérations et la cause de leurs admirations. Cette foi vive qu'ils avaient produisait en eux l'espérance, et une confiance en Dieu si grande, que quoiqu'ils se vissent dénués des biens de la terre, de parents riches et d'amis ; persécutés des hommes, rejetés de tout le monde, néanmoins ils n'ont jamais douté du soin paternel de Dieu à leur égard, auquel ils s'attachaient d'autant plus, qu'ils le voyaient privé de tout appui humain, et délaissés des créatures. La charité qui est la Reine des vertus opérait en eux un ardent amour envers Dieu, une compassion grande des misères corporelles et spirituelles du prochain, qui les possédait d'une telle manière qu'il n'y a pas eu un moment dans toute leur vie, qu'ils n'aient dirigé à la plus grande gloire de Dieu, et au salut des âmes. De ces trois vertus résultait celle de Religion, qui consiste dans le culte extérieur que nous rendons à Dieu, qu'ils pratiquaient en trois manières, qu'ils pratiquaient en trois manières.
Premièrement, n'omettant rien de toutes les cérémonies ordonnées par la loi ; c'est pour ce sujet que Jésus s'assujettit à la Circoncision, Marie à la Purification sans y être obligée, et tous les ans ils venaient en Jérusalem adorer Dieu dans le Temple.
Secondement, ils s'appliquaient plusieurs fois le jour à la prière, y ayant recours en toute occasion, mais spécialement le matin, le soir, avant les repas, et au commencement de chaque action ; outre cela ils élevaient sans cesse leur cœur à Dieu par de Saintes aspirations, et ils ne se contentaient pas de le faire durant le jour, mais encore pendant la nuit, puisque l'on croit communément que lorsque l'Ange saluât la Sainte Vierge, il la trouva en oraison environ l'heure de minuit.
Troisièmement, ils faisaient paraitre par la modestie qu'ils avaient dans les lieux Saints, et le respect avec lequel ils traitaient les choses Saintes, et tout ce qui appartient au culte divin, l'estime qu'ils faisaient de Dieu.
D. Je prends d'autant plus plaisir à vous entendre parler des vertus de la Sainte Famille que je n'y vois rien qui ne soit imitable, quoique très admirable, je vous prie donc de continuer cette matière.
R. Entre les vertus Morales, l'humilité est la plus grande et la plus petite, et toutes ses grandeurs sont dans sa bassesse et font que l'on est d'autant plus que l'on veut être moins. C'est cette vertu qui a parue dans la Sainte Famille en un souverain degré, en ce que celui qui était le plus grand, s'est fait le plus petit, la Sainte Vierge l'a suivi de plus près, et Saint Joseph quoique le moindre en grâce a imité parfaitement tous les deux. Ces trois Saintes Personnes fuyaient avec soin tout ce qui avait de l'éclat, et qui pouvait leur acquérir de l'estime et de l'honneur, cachant la grandeur de leur intérieur sous un extérieur for commun, embrassant avec joie les mépris, et les rebuts qui leur arrivaient de la part des hommes.
Leur humilité se faisait encore paraitre dans leur obéissance. Qu'il faisait beau de voir le Roi du Ciel et de la terre n'avoir point d'autre occupation que de faire ce que ses parents lui commandaient, c'est tout ce que les Saintes écritures nous font connaître de ses emplois en la Sainte Famille en ces deux mots, v. Il leur était soumis ; la Sainte Vierge obéissait à Saint Joseph, et Saint Joseph à l'Ange qui lui servait d'interprète des volonté de Dieu, ils étaient tout à fait soumis non seulement aux lois divines et Ecclésiastiques comme il a été dit, mais aussi aux lois humaines, et ils étaient dans l'obéissance actuelle aux Édits de l'Empereur lorsque Jésus par sa naissance fut l'accomplissement de la Sainte Famille.
Leur pauvreté d'esprit paraissait dans leur détachement général de tous les biens de la terre, et leur faisait préférer la privation à l'abondance, et quoiqu'ils fussent dénués le plus souvent du nécessaire, néanmoins jamais leurs désirs ne se sont portés vers les richesses, mais uniquement vers Dieu, de qui ils attendaient sans empressement leurs subsistance.
La chasteté a été la vertu propre de cette Sainte Famille, puisqu'elle y a été conservée par un miracle tout nouveau, Jésus étant le fruit d'un mariage virginal ; la Sainte Vierge et Saint Joseph avaient tant d'amour pour cette aimable vertu, que celle-la eut plutôt renoncé à la maternité d'un Dieu, et celui-ci à être l'Époux de la Mère de Dieu, qu'à la Virginité qu'ils avaient consacrée à Dieu avant leur mariage, aussi ne le contractèrent-ils après leur vœu que par un mouvement particulier du Saint-Esprit .
Il y a encore une infinité d'autres vertus qui s'y rencontraient comme dans leur centre et leur origine, puisqu'il n'y en manquait aucune ; et je ne trouverais pas de fin dans une matière si ample, qui doit être plutôt sujet de vos méditations, que de nos entretiens.
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