« Madame de la Roche-Saint-André, née Du Chaffault. fut arrêtée à Nantes et jetée en prison. Après y avoir longtemps langui, elle fut condamnée à périr dans la Loire. Mais on sut qu'elle avait été du nombre de ces dames qui avaient demandé grâce pour les 3.000 républicains faits prisonniers à Montaigu, en 1793 : on la relâcha.
« Elle était presque sans vêtements. Mourant de faim et craignant d'être prise une seconde fois, elle alla dans les faubourgs de Nantes, se présenter pour servir dans un hôtel. On la reçut pour sa vie, comme une fille de peine. On lui coupait son pain, qu'elle mangeait debout. Elle jouait l'innocente. On l'appelait Marion. Elle couchait dans un taudis. Ses nuits étaient bien tristes : elle en passait une grande partie à pleurer et à prier.
« Une nuit, elle entendit du bruit à sa porte. Elle en fut grandement effrayée et se recommanda à Dieu. On frappa de nouveau. Alors elle se hasarde à demander : Qui est là ?
— Je suis le bonhomme Pierre, Mamzelle Marion ; n'ayez pas peur de moi : car je crains Dieu.
Pierre était un vieux valet d'écurie.
— Que voulez-vous, bonhomme Pierre, demande la Vendéenne.
— Ma bonne demoiselle, répond le vieux domestique, vous craignez le bon Dieu, je le sais bien ; j'ai remarqué que votre mouchoir de cou est tout déchiré, et que vous avez bien de la peine à l'arranger avec des épingles. J'avais cent sous ; j'ai acheté un morceau de toile, et je veux vous le donner pour vous couvrir.
« La pauvre fugitive ouvrit sa porte et reçut ce touchant cadeau avec une grande reconnaissance (1). »
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(1) Mémoires de MONSEIGNEUR DE BEAUREGARD, Poitiers, 1842, pp. 87, 88.
A suivre : II : DOULOUREUX ÉPISODES DE L'EXPÉDITION D'OUTRE-LOIRE.
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