ACTES DES APÔTRES

INTRODUCTION

(suite)

Il est probable qu'en faisant ses recherches sur la vie du Sauveur, S. Luc eut soin de recueillir tout ce qui lui fut communiqué d'intéressant sur les premiers disciples. Outre les notes qu'on avait dû prendre et garder sur certains faits, par exemple, les délibérations du sanhédrin au sujet des Apôtres, les premiers discours de S. Pierre, le jugement et le supplice de S. Etienne, outre certains documents officiels, comme la lettre synodale du Concile de Jérusalem, cet auteur fut à même de consulter et d'entendre les témoins les plus compétents : S. Paul, avec lequel il passa seize années entières et dont il avait les Épîtres entre les mains, S. Pierre, qu'il eut plusieurs fois occasion de voir, S. Jacques le Mineur, auprès duquel il séjourna à Jérusalem, S. Philippe, qu'il visita en passant à Césarée et qu'il entretint à loisir dans les deux premières années de la captivité de son Maître, S. Marc à Rome, et une foule de disciples dont on ignore les noms. Pour les faits qui remplissent les douze derniers chapitres, il n'avait qu'à se rappeler ses propres souvenirs; car après avoir quitté son pays pour s'attacher à S. Paul, il ne s'en est presque jamais séparé : d'Antioche il l'a suivi à Troade, à Philippes, à Milet, à Césarée, à Jérusalem et enfin à Rome.

C'est dans cette dernière ville, probablement, que S. Luc acheva sa rédaction. Il avait pu commencer son travail auparavant, prendre des notes à mesure qu'il voyait les faits se succéder; mais tout porte à croire qu'il termina son écrit dans l'intervalle qui sépare la publication du troisième Évangile des derniers faits rapportés dans les Actes, c'est-à-dire entre l'an 58 et l'an 63, trente ans au plus après la mort de Jésus-Christ, huit ou dix avant la ruine de Jérusalem. Ainsi s'expliquent la précision, la vivacité, la fraîcheur de souvenir qu'on remarque dans ses derniers récits, par exemple, la comparution de l'Apôtre devant Agrippa, son voyage sur mer, sa rencontre avec les chrétiens de Rome sur la voie Appienne, sa première conférence avec les Juifs de cette ville.

Au moins, le livre fut-il achevé avant la ruine de Jérusalem, qui est toujours supposée debout, et avant le martyre de l'Apôtre dont l'auteur ne fait aucune mention, qu'il ne fait pas même pressentir. Bien plus, si l'on compare ce que S. Paul dit aux anciens d'Ephèse, qu'ils ne doivent plus le revoir, avec les assurances qu'il donne aux Philippiens et à Philémon, on est porté à croire que l'écrit de S. Luc a été publié avant la fin de la première captivité; car s'il l'avait été plus tard, il est probable que l'auteur n'aurait pas manqué d'écarter toute prévision funeste, en avertissant le lecteur que l'Apôtre avait recouvré sa liberté et que ses disciples de Philippes et de Colosses avaient vu se réaliser les espérances qu'il leur donnait du fond de sa prison.

Si l'on trouve dans les Actes quelques indications géographiques, c'est sur Jérusalem et la Palestine. On n'y voit aucune particularité sur l'Italie, ni sur le séjour que S. Paul a fait à Rome. C'est une raison de penser que l'auteur destinait son écrit particulièrement aux fidèles de cette ville et aux chrétiens d'Europe convertis par son Maître.

La tradition a toujours attribué les Actes des Apôtres à S. Luc.

On trouve, dans toutes les Introductions à la sainte Ecriture, les témoignages les plus convaincants de la foi de l'Eglise à cet égard : — le Canon de Muratori (160-170), qui place ce livre à la suite des Évangiles; — la Version italique et la Version syriaque, dont les Actes ont toujours fait partie ; — des citations des auteurs les plus graves et des Pères les plus anciens, depuis S. Augustin, qui nous apprend l'usage où était l'Eglise latine de faire lire ce livre durant le temps pascal, comme un monument assuré de la résurrection du Sauveur, jusqu'à Origène (230), qui en a fait l'objet de vingt Homélies dont il reste quelques fragments, jusqu'à Tertullien (207), qui le cite en cinquante endroits de ses écrits, jusqu'à Clément d'Alexandrie (193), qui trouve un certain rapport entre le style des Actes et celui de l'Epître aux Hébreux, jusqu'à S. Irénée (180), qui fait valoir, en les citant, l'autorité de S. Luc, jusqu'aux Pères apostoliques eux-mêmes, en particulier S. Polycarpe, qui y fait visiblement allusion dans son Epître aux Philippiens, dès la première partie du second siècle.

L'étude critique des Actes démontre de la manière la plus certaine : — que ce livre est l'œuvre d'un seul auteur ; — que cet auteur était contemporain des Apôtres ; — qu'il était disciple et compagnon de S. Paul ; — qu'il a écrit le troisième Évangile ; — enfin, qu'il ne peut être différent de S. Luc.

C’est l'œuvre d'un seul auteur.…