Q. 74. Comment s'appelle ce péché transmis aux descendants d'Adam?
R. Ce péché transmis aux descendants d’Adam s’appelle le péché originel (1).
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(1) Job, XIV, 4; Psaume L, 6; saint Jean, III, 5; saint Paul, Ire Ep. à Timothée, II, 6; Ep. aux Romains, V, 12-14,18-19; Concile de Carthage (de 418), canon 2; 2e Concile d’Orange, canons 1, 2; Concile de Florence, Décret aux Jacobites; Concile de Trente, session V, De peccato originali; Pie IX, Alloc. Singulari quadam, 9 déc. 1854; saint Cyrille d’Alex. , In Epist. ad Rom., V, 18.
— Si on le juge à propos, on pourra développer ainsi ce qui précède. Le premier homme fut créé dans un état de perfection, tant en son corps, qui devait pouvoir tout de suite engendrer, qu’en son âme, qui devait aussi pouvoir tout de suite instruire et diriger les autres avec la science naturelle nécessaire. Cette science fut donnée à l’un et à l’autre de nos premiers parents, mais surtout à Adam, à qui incombait principalement d’instruire et diriger les autres; elle ne devait pas être transmise aux enfants qui seraient nés dans l’état d’innocence; ceux-ci pourtant auraient acquis la science qui leur eût convenu, par découverte ou enseignement, peu à peu, mais sans difficulté (saint Thomas, p. Ia q. 74, a. 5, et q. 101 a. 1, 2).
— En élevant nos premiers parents à un état surnaturel, Dieu leur révéla les vérités qui concernaient cet état et qu’Adam devait transmettre à ses descendants; en même temps II leur conféra la justice et la sainteté avec les autres dons.
— Adam, par son péché, perdit tous ces dons, et pour soi-même et pour ses descendants, sans perdre toutefois la science naturelle, ni la connaissance des vérités révélées. Mais la perte de la justice et de la sainteté, et, nommément de l’intégrité de la nature, fut l’origine de cette lutte entre les facultés inférieures et la raison dont parle saint Paul, Gal, V, 17 : « La chair convoite contre l’esprit et l’esprit contre la chair, car ils sont en lutte l’un contre l’autre ». La faute du premier homme a ainsi infligé une grave et douloureuse blessure à la nature humaine, enténébrant son esprit et inclinant sa volonté au mal (Pie IX, l. c; saint Thomas, Ia IIæ, q. 85, a. 3 et 5).
— Dieu, dans son infinie miséricorde, promit alors un Rédempteur au genre humain, et, par leur foi en Lui et en ses mérites, avec l’aide de la grâce divine, nos premiers parents et beaucoup de leurs descendants furent dès cette vie délivrés de tout péché originel et actuel, ainsi que de la peine due aux péchés actuels; mais ils restèrent astreints à la peine du péché originel, qui les excluait de la gloire tant que ne serait point versé le prix de la rédemption (saint Thomas, p. 3a, q. 52, a. 5, ad 2m). Cependant la plupart de leurs descendants perdirent complètement la connaissance des vérités de la foi et de la morale, ou bien en altérèrent la substance.
— On voit par là combien on est loin de la vérité, quand on prétend que le premier homme fut créé dans un état de barbarie sauvage, ou bien qu’il descend du singe et qu’il s’est développé par une évolution successive : quiconque reçoit la lumière de la foi catholique rejettera ces hypothèses. L’état sauvage et barbare où a longtemps vécu et vit encore aujourd’hui une grand[e] partie des hommes n’est que le résultat de la corruption, par suite du péché, de la condition primitive.
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Concile de Carthage (418) approuvé par le pape S. Zosime, 2e canon contre les Pélagiens :
a) « En outre on a décidé ce qui suit : quiconque nie que les enfants nouveau-nés doivent être baptisés ou dit qu’ils sont bien baptisés pour la rémission des péchés, mais qu’ils n'ont rien pris à Adam du péché originel qui soit purifié par le bain de régénération et que par conséquent, appliquée à eux, la formule du baptême : « en rémission des péchés », doit être tenue pour fausse et non pas vraie : qu’il soit anathème. Car la parole de l’Apôtre : Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort a atteint tous les hommes parce que tous ont péché (Epître aux Romains, V, 12),ne doit pas s’entendre autrement que l’Église catholique, universellement répandue, l’a toujours entendue. Et, selon cette règle de foi, même les petits enfants qui par eux-mêmes n’ont pu encore commettre aucun péché sont vraiment baptisés en rémission des péchés, et la régénération purifie en eux la souillure que la génération leur a infligée ».
(Mansi, III, 811. — D.-B., 102).
IIe Concile d’Orange (529) confirmé par Boniface II, canons contre les Semipélagiens :
b) « Canon I. Si quelqu'un dit que par l'offense du péché d’Adam l’homme n’a pas été dégradé tout entier, c’est-à-dire dans son corps et dans son âme, mais croit que, l’âme gardant sa liberté sans blessure, le corps seul a été touché par la corruption, il est trompé par l'erreur pélagienne et dément l’Écriture qui déclare : L'âme qui a péché, c'est elle qui mourra (Ezéchiel, XVIII, 20); et : Ne savez-vous pas que, si vous vous livrez à quelqu'un comme esclaves pour lui obéir, vous êtes esclaves de celui à qui vous obéissez? (Epître aux Romains, VI, 16); et : On est esclave de celui par qui on s'est laissé vaincre. (2e Épître de saint Pierre, II, 19).
« Canon 2. Si quelqu’un soutient que sa prévarication n’a fait de tort qu’à Adam et non à sa descendance; ou du moins prétend que seule la mort du corps qui est la peine du péché, et non le péché qui est la peine de l'âme, a passé par un seul homme sur tout le genre humain, il impute une injustice à Dieu et il contredit cette affirmation de l’Apôtre : Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort a atteint tous les hommes parce que tous ont péché » (Epître aux Romains, V, 12).
(Mansi, VIII, 712. — D.-B., 174,175) .
Concile de Florence, Decretum pro Jacobitis :
c) « Le Concile croit fermement, professe et enseigne que jamais nul, conçu d'un homme et d'une femme, n'a été délivré de la domination du diable, sinon par le mérite du médiateur entre Dieu et les hommes, Jésus-Christ Notre-Seigneur : conçu, né et mort sans péché, il a seul, par sa mort, abattu l'ennemi du genre humain en effaçant nos péchés; il a ouvert l'entrée du royaume céleste, que le premier homme avait, par son péché personnel, perdu pour toute sa descendance: tous les mystères, les sacrifices, les sacrements, les cérémonies de l'Ancien Testament préfiguraient qu’il viendrait un jour ».
(Mansi, XXXI, 1738. — D.-B., 711).
Concile de Trente, sess. V, Decretum de peccato originali, canons I à 6:
d) « I. Si quelqu'un ne confesse pas que le premier homme, Adam, ayant transgressé dans le Paradis le commandement de Dieu, perdit aussitôt la sainteté et la justice dans lesquelles il avait été établi, et, par l’offense d’une telle prévarication, encourut la colère et l'indignation de Dieu, et en conséquence la mort, dont Dieu l'avait menacé auparavant, et, avec la mort, la captivité sous la puissance de celui qui a eu depuis l’empire de la mort, et qui est le Diable, et que, par l'offense de cette prévarication, Adam tout entier tomba dans un état pire selon le corps et l'âme : qu'il soit anathème.
« 2. Si quelqu'un soutient que la prévarication d’Adam n’a été nuisible qu’à lui et non pas à sa postérité, qu'il n'a perdu que pour lui et non pas aussi pour nous la sainteté et la justice, reçues de Dieu, et dont il est déchu, ou que, souillé personnellement par le péché de désobéissance, il n’a transmis à tout le genre humain que la mort et les peines du corps, et non pas le péché, qui est la mort de l’âme : qu’il soit anathème; en effet c’est contredire l’affirmation de l’Apôtre : Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort a atteint tous les hommes, parce que tous ont péché (Epître aux Romains, V, 12).
« 3. Si quelqu’un soutient que ce péché d’Adam, qui est un dans sa source, et qui est transmis à tous par propagation, non par imitation, et donc qui est propre à chacun, peut être enlevé soit par les forces de la nature humaine, soit par un autre remède que par le mérite du seul médiateur Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui nous a réconciliés avec Dieu dans son sang, s'étant fait pour nous justice, sanctification, et rédemption (Ire Epître aux Corinthiens, I. 30); ou nie que le mérite même du Christ Jésus soit appliqué, tant aux adultes qu’aux enfants, par le sacrement de Baptême, conféré rituellement selon la forme de l’Église : qu’il soit anathème; parce qu'il n’y a pas sous le ciel un autre nom qui ait été donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés (Actes des Apôtres, IV, 12). D’où cette parole : Voici l'agneau de Dieu, voici celui qui ôte les péchés du monde (Saint Jean, I, 29). Et cette autre ; Vous tous qui avez été baptisés, vous avez revêtu le Christ (Epître aux Galates, III, 27).
« 4. Si quelqu’un nie que les enfants récemment sortis du sein de leur mère, même s’ils sont nés de parents baptisés, doivent être baptisés; ou dit qu’ils sont vraiment baptisés pour la rémission des péchés, mais ne tirent rien du péché originel d’Adam qu’il soit nécessaire d’expier par le bain de la régénération, pour obtenir la vie éternelle; d’où il s’ensuivrait que pour eux la forme du Baptême en vue de la rémission des péchés serait comprise faussement et non pas véritablement : qu’il soit anathème; car la parole de l’Apôtre : Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et ainsi la mort a atteint tous les hommes, parce que tous ont péché (Epître aux Romains, V, 12), ne peut être entendue d’une autre manière que celle dont l’a toujours entendue l’Église catholique répandue partout. En effet, à cause de cette règle de foi, selon la tradition des Apôtres, même les petits enfants, qui n’ont pu encore commettre aucun péché personnel, sont pourtant véritablement baptisés pour la rémission des péchés, afin que ce qu’ils ont contracté par la génération soit purifié par la régénération. Car nul, s'il ne renaît de l'eau et de l'Esprit-Saint, ne peut entrer dans le royaume de Dieu, (Saint Jean, III, 5).
« 5. Si quelqu’un nie que la faute du péché originel soit remise par la grâce de Jésus-Christ Notre-Seigneur, conférée au Baptême; ou même soutient que tout ce qui a raison vraie et propre de péché n’est pas ôté; mais dit que cela est seulement gratté, ou n’est pas imputé : qu’il soit anathème. Car Dieu ne hait rien dans ceux qui sont régénérés, parce qu’il n’y a point de damnation pour ceux qui vraiment sont ensevelis dans la mort avec le Christ par le Baptême (Epître aux Romains, VI, 4); qui ne marchent point selon la chair(ib., VIII, I), mais qui, dépouillant le vieil homme et se revêtant du nouveau, qui est créé selon Dieu (Epître aux Ephésiens, IV, 22), sont devenus innocents, immaculés, purs, sans péché, et agréables à Dieu, héritiers de Dieu, et cohéritiers du Christ (Epître aux Romains, VIII, 17); en sorte qu’il ne reste plus rien qui les empêche d’entrer au ciel. Cependant ce saint Concile confesse et reconnaît que la concupiscence, ou foyer du péché, reste dans les baptisés; laissée pour le combat, elle ne peut nuire à ceux qui n’y consentent pas, mais qui résistent courageusement par la grâce du Christ Jésus : bien mieux, celui qui aura lutté selon les règles sera couronné(2e Epître à Timothée, II, 5). Le saint Concile déclare que cette concupiscence, appelée quelquefois péché par l'Apôtre ( Epître aux Romains, VI, 12), n’a jamais été entendue par l’Église catholique au sens d’un péché qui serait véritablement et proprement péché dans ceux qui sont régénérés, mais [elle est appelée péché] en ce sens qu’elle vient du péché et y incline. Si quelqu’un pense le contraire : qu’il soit anathème.
« 6. Cependant ce même saint Concile déclare qu’il n’est pas dans son intention de comprendre, dans ce décret sur le péché originel, la bienheureuse et immaculée Vierge Marie, mère de Dieu; mais il entend qu’à ce sujet les Constitutions du pape Sixte IV, d’heureuse mémoire, soient observées sous les peines qui y sont portées, et qu’il renouvelle ».
(D. B., 788-792).
Pie IX, Allocution Singulari quadam, du 9 décembre 1854 :
e) « Mais ces partisans, ou plutôt ces adorateurs de la raison humaine, qui se la proposent comme une maîtresse certaine et qui se flattent de réussir en tout sous sa direction, oublient certainement la gravité et la profondeur de la blessure que la faute de notre premier père a infligée à la nature humaine, les ténèbres qui aveuglent son esprit, et l’inclination qui porte sa volonté au mal. [Le premier de ces effets explique] pourquoi les plus célèbres philosophes de l’antiquité, quoiqu’ayant écrit beaucoup de choses remarquables, ont cependant gâté leurs doctrines par de très graves erreurs. [Le second effet du péché originel] est la cause de ce combat continuel que nous expérimentons en nous et que l’Apôtre décrit ainsi : Je sens dans mes membres une loi qui s'oppose à la loi de mon esprit (Epître aux Romains, VII , 23) ».
(Acta Pii IX, pars I, I, 624. — D.-B., 1643).
Saint Cyrille d’Alexandrie, Sur l'Epître aux Romains, au verset V, 18 :
f) « Pour nous, nous sommes devenus pécheurs à cause de la désobéissance d’Adam, voici comment : lui, il avait été créé pour l’incorruptibilité et la vie, et dans le jardin de délices ses mœurs étaient saintes, son intelligence toujours appliquée à la vision de Dieu, son corps parfaitement sain et tranquille, sans volupté honteuse, sans mouvements désordonnés qui l’agitassent. Mais après qu’il fut tombé dans le péché et eut ouvert la porte à la corruption, aussitôt les voluptés impures s’insinuèrent dans la nature charnelle et en même temps la dure loi des membres devint la loi de notre nature. La nature a donc contracté la maladie du péché à cause de la désobéissance d’un seul, qui est Adam, et ainsi un très grand nombre furent établis pécheurs; non pas qu’ils aient péché en même temps qu’Adam, car aucun d’eux n’était là, mais parce qu’ils sont de la même nature qu’Adam et que cette nature est tombée sous la loi du péché ». (P. G., 74,789. — R. J.,2122).
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