Q. 594. Tous les bienheureux du Paradis jouissent-ils également de la béatitude éternelle?
R. Tous les bienheureux du Paradis ne jouissent pas également de la béatitude éternelle, mais les uns plus parfaitement que les autres (2).
_______________________________________________________________
(2) Concile de Florence, l. c; Concile de Trente, sess. VI, De Justif., can. 32; saint Grégoire le Grand, Moralia, IV, 70 ; Aphraate, Démonstrations, XXII, 19 ; saint Ephrem, Hymnes et Sermons, 11; saint Jérôme, Contre Jovinien, II, 32, 34; Contre les livres de Rufin, 1, 23; saint Augustin, Sermon LXXXVII, 4, 6; Sur l'Évang. de saint Jean, LXVII, 2.
_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _
a) Concile de Florence, Decretum pro Graecis :
« Si des hommes vraiment repentants meurent dans l'amour de Dieu avant d'avoir satisfait par de dignes fruits de pénitence pour leurs fautes d'action ou d'omission, leurs âmes sont purifiées après la mort par les peines du purgatoire. Et pour la délivrance de ces peines, ils profitent des suffrages des fidèles vivants, c'est à-dire des Messes, prières, aumônes et autres œuvres pies que les fidèles ont coutume d'accomplir pour les autres fidèles, selon les règles établies par l'Église.
« Les âmes de ceux qui après la réception du baptême se sont gardés entièrement à l'abri de la tache du péché ou qui après avoir contracté la tache du péché en ont été purifiées, soit dans leur corps, soit une fois sorties de leurs corps de la manière susdite, sont immédiatement admises au ciel et voient clairement Dieu un et trine, en lui-même comme il est, plus ou moins parfaitement l'une que l'autre, cependant, selon la diversité des mérites. Quant aux âmes de ceux qui meurent dans le péché actuel ou seulement dans le péché originel, elles descendent immédiatement en enfer, afin d'y être punies par des peines inégales toutefois ». (Mansi, XXXI, 1031. — D.-B., 693).
Concile de Trente, session VI, Décret. de justificatione, can. 32 :
b) « Si quelqu’un dit que les bonnes œuvres d’un homme justifié sont tellement des dons de Dieu qu’elles ne soient pas aussi les mérites de cet homme justifié ou que les bonnes œuvres qu’il fait par la grâce de Dieu et par le mérite de Jésus-Christ dont il est un membre vivant ne lui méritent pas en justice une augmentation de grâce, la vie éternelle, la possession de cette même vie, pourvu qu’il meure en état de grâce, et même une augmentation de gloire : qu’il soit anathème ». (D.— B., 842).
Saint Grégoire le Grand, Moralia, IV, 70 :
c) « Puisqu’en cette vie il y a entre nous diversité des œuvres, sans aucun doute il y aura en l'autre diversité des dignités et, comme ici bas un homme l'emporte sur l'autre en mérite, là-haut l'un dépassera l'autre en récompense. C’est pourquoi la Vérité dit dans l’Évangile : Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures (saint Jean, XIV, 2). Mais la diversité des récompenses qu’on recevra dans ces « nombreuses demeures » sera elle-même, de quelque façon, harmonieuse. Car nous serons si fortement unis dans ce séjour de paix que ce que l’un n’aura pas reçu en lui-même, il exultera de l’avoir reçu en autrui. C’est pourquoi ceux qui n’ont pas travaillé également dans la vigne (saint Matthieu, XX, 10) reçoivent également un denier. Certes il y a de nombreuses demeures auprès du Père, et pourtant des hommes qui ont inégalement travaillé reçoivent le même denier; car la béatitude de la joie sera unique pour tous, bien que la sublimité de la vie ne le soit pas ». (P. L., 75, 677. — R. J., 2308).
Aphraate, Demonstrationes, XXII, 19 :
d) « Écoutez maintenant ce que dit l’Apôtre : Chacun recevra sa récompense selon son travai (Ire Épître aux Corinthiens, III, 8). Celui qui aura peu travaillé recevra selon sa fatigue. Celui qui aura beaucoup couru emportera le prix selon sa course... Et l’Apôtre dit encore : L'étoile dépasse l'étoile en éclat; ainsi en sera-t-il de la résurrection des morts. (Ire Épître aux Corinthiens, XV, 41-42). Tu sauras ainsi que, même lorsqu’ils entreront dans la vie, tous les hommes recevront un salaire plus ou moins élevé, une gloire plus ou moins éclatante et une récompense plus ou moins grande les uns que les autres ». (Patrologia Syriaca, I, 1030.— R. J., 696).
Saint Ephrem, Hymni et sermones, Sermo de magis, II :
e) « Ceux qui auront fait le bien passeront dans un lieu rempli de biens; mais les mauvais demeureront dans la géhenne pour devenir la nourriture du feu, et pour que les flots de feu les entraînent et les mènent chacun dans sa demeure; ils immergent celui-ci dans la boue, d’où il ne sera jamais retiré; ils jettent celui-là dans le feu, pour qu’il y reste éternellement; l’un sortira dans les ténèbres et ne verra jamais le feu; l’autre descendra dans l’abîme et n’en remontera jamais; mais un autre ira dans le lieu saint pour y rester éternellement. Il y en a qui siégeront au deuxième degré, d’autres au troisième, d’autres seront élevés jusqu’au cinquième, d’autres jusqu’au sixième, d’autres jusqu’au trentième, d’autres siégeront dans les sommets... Car chacun recevra de la justice en personne le salaire proportionné à son travail ».
(Lamy, S. Ephr. Hymni et sermones, II, 424. — R. J. 710).
Saint Jérôme, Adversus Jovinianum, II, 32-34 :
f) « C’est ici-bas l’effet de nos efforts, de nous préparer des récompenses diverses, selon la diversité de nos forces... Si nous devons tous être égaux dans le ciel, c’est en vain que nous nous humilions ici-bas pour pouvoir occuper une place plus élevée là-haut... A quoi bon la persévérance des vierges ? A quoi bon le travail des veuves ? Pourquoi la continence des épouses ? Péchons tous et, après nous être repentis, nous serons tout pareils aux Apôtres ». (P. L., 23, 329 ss. — R. J., 1383).
Du même, Adversus libros Rufini, I, 23 :
g) « Comme on appelle archange celui qui vient avant les anges, ainsi les principautés, les puissances et les dominations ne reçoivent ce nom que parce qu’elles ont des êtres placés sous elles et appartenant à un ordre inférieur... De même qu’entre les hommes règne une hiérarchie de dignités, conformément à la variété des travaux, — puisque l’évêque, le prêtre et tout membre de la hiérarchie de l’Église a son rang déterminé, — et pourtant tous sont hommes, ainsi entre les anges il y a diversité de mérites, quoique tous demeurent dans leurs prérogatives d’ange ». (P. L. , 23, 416 s.. — R. J., 1394).
Saint Augustin, Sermon 87, 4, 6 :
h) « Nous serons donc tous égaux à l’égard de ce salaire, les premiers étant les derniers et les derniers les premiers; car ce denier (saint Matthieu, XX, 2) est la vie éternelle et dans la vie éternelle tous seront égaux. Car, si les uns brilleront davantage que les autres suivant la diversité des mérites, cependant en ce qui concerne la vie éternelle [en elle-même] elle sera égale pour tous ». (P. L., 38, 533. — R. J., 1502).
Du même, In Joannis evangelium tractatus, LXVII, 2 :
i) « Il est égal pour tous, ce denier que le père de famille fait donner à tous ceux qui ont travaillé dans la vigne sans faire de différence entre ceux qui ont travaillé plus ou moins (saint Matthieu, XX, 9) ; évidemment, ce denier signifie la vie éternelle dans laquelle nul ne vit plus qu’un autre, car il n’y a pas mesure diverse de vie dans l’éternité. Mais les nombreuses demeures (saint Jean, XIV, 2) signifient l’éclat des mérites, divers dans l’unité de la vie éternelle ». (P. L., 35, 1812. — R. J., 1831).
Marcadores