LE
SAINT ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST
SELON SAINT MATTHIEU
(suite)
5° Les dispositions qu'il manifeste conviennent parfaitement à S. Matthieu. — Le style de cet écrit est simple, uniforme et peu soigné. C'est partout la même manière de passer des faits aux discours et des discours aux faits. Le mot « alors » se trouve répété près de cent fois. Néanmoins cette rédaction, et surtout les citations de l'Ancien Testament dont elle est semée, supposent une culture d'esprit que la plupart des apôtres n'avaient pas. Or, l'emploi que S. Matthieu remplissait, avant son apostolat, demandait précisément un degré particulier d'instruction. Rien d'étonnant qu'il soit le premier à qui on ait demandé et qui ait entrepris de tracer une esquisse de la prédication du Sauveur. De plus, on fait observer que l'auteur du premier évangile s'exprime avec une précision remarquable, lorsqu'il s'agit de cens et d'impôt.
— Sa modestie n'est pas moins remarquable. S. Matthieu trouvait, comme S. Paul, un sujet de confusion dans la première partie de sa vie, et il est à croire que lui seul, entre les disciples du Sauveur, pouvait se plaire à rappeler son ancienne profession de publicain. Or c'est précisément ce qui a lieu. Comme il avait changé son nom de Lévi en celui de Matthieu, don de Dieu, au moment où il s'attachait à Notre Seigneur, lorsque S. Marc et S. Luc rapportent le fait de sa vocation et qu'ils font connaître son premier emploi, ils ont soin de ne le désigner que par son ancien nom, afin de ne pas associer dans l'esprit des fidèles l'idée d'un apôtre avec le souvenir d'une profession odieuse.
Mais le premier évangéliste ne songe pas à rien dissimuler : il dit simplement Matthieu, ou le publicain; et il indique le bureau qu'il occupait à Capharnaüm. Cette observation a été faite de bonne heure : nous la trouvons dans Eusèbe, S. Jérôme et S. Chrysostôme. On peut y joindre une autre remarque du même genre. On sait que le Sauveur envoya ses Apôtres prêcher l’Évangile deux à deux.
Les trois synoptiques qui rapportent ce fait mettent, comme compagnons d'apostolat, au quatrième rang, S. Matthieu et S. Thomas, mais avec cette différence que le premier évangéliste donne la première place à S. Thomas et que les deux derniers la donnent à S. Matthieu. Quiconque tiendra compte des leçons données par le Sauveur à ses Apôtres et du sentiment qu'on a toujours eu de leur vertu, croira volontiers que c'est S. Matthieu lui-même qui s'est mis ici au second rang, tandis que ses collègues le plaçaient au premier. (M. BACUEZ.) (1).
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(1) Toutes les citations de M. Bacuez faites dans ce volume sont tirées du Manuel biblique.
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