Dans ses Souvenirs, la comtesse de la Bouëre (3) place immédiatement après la bataille de Torfou le meurtre atroce des victimes du puits du château de Clisson.

Les Mayençais, commandés par Cordellier, comblèrent ce puits avec les cadavres d'environ 400 Vendéens. C'étaient surtout des vieillards, des femmes et des enfants. Ils les avaient trouvés cachés dans un bâtiment appelé les Archives. Une pauvre femme y avait allumé du feu pour réchauffer son petit enfant malade. La fumée trahit ces malheureux. On les chasse à coups de sabre et de baïonnette, et on les précipite dans le puits.

Un enfant de 7 à 8 ans put s'échapper, en s'accrochant à des barres de fer qui se trouvaient scellées dans les parois. Les soldats voulurent le précipiter de nouveau, en lui coupant un poignet et en le sabrant sur les épaules : mais, de l'autre main, l'enfant continuait à se cramponner aux barres. Touché de compassion, un soldat le saisit par un bras et le retire en disant : « Sauve-toi, si tu peux ». L'enfant eut la chance de guérir.

Une jeune fille put également échapper au massacre, en se glissant dans un obscur réduit des Archives. Se jetant ensuite par une fenêtre, elle tomba dans un endroit d'où elle fut témoin, sans être aperçue, de cette horrible scène (1).

L'affreuse boucherie du puits de Clisson s'est renouvelée, le 30 mars 1793, dans un des puits de Montaigu (2).

Dans ce tableau chronologique, où nous venons de grouper comme un ensemble de la première phase de la persécution, il convient d'encadrer quelques physionomies de martyrs, qui vont animer sous nos yeux et peindre au vif l'héroïsme simple et calme que les victimes opposaient à la férocité des bourreaux.

Le 18 novembre 1793, la commission militaire de Laval faisait fusiller un pauvre cordonnier de Saint-Pierre-la-Cour, nommé Louis David.

On voulait le contraindre à crier : Vive la République !

— Non, répond l'inébranlable chrétien, parce que je croirais crier vive l'enfer, puisque c'est votre République qui persécute la religion et qui a fait périr notre bon roi.

David fut condamné et exécuté le jour même.

Marchant à la mort avec le courage d'un martyr, il chanta jusque sur l'échafaud le cantique :

Je mets ma confiance,
Vierge, en votre secours (3).


Quelques semaines après, à peu de distance de Montoir, dans le désastre de Savenay, des fugitifs, épuisés de fatigue, s'étaient arrêtés au pied d'une croix…
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(3) Souvenirs de la comtesse de la BOUËRE, chez Plon, 1890. — (1)Souvenirs de Madame la Comtesse de la BOUËRE, pp. 77, 78. — (2) Ibid. — (3) CRÉTINEAU-JOLY.